L’honnêteté récompensée

– Paul, cours au village et rapporte-moi tout ce que j’ai inscrit sur cette liste. Voilà dix mille francs, dit la maman, ne les perds pas !

Le garçon eut vite fait d’arriver au village. Le commerçant prit la liste, lui donna les provisions et Paul paya avec le billet de dix mille francs. Comme il était pressé, il prit toute la monnaie dans sa main. Finalement, ayant peur de perdre quelque chose, il s’arrêta, posa son sac et voulut ranger cet argent.

– Mais quoi ! Il s’est trompé ! Paul avait en main deux billets de cinq mille francs plus de la monnaie – il y avait donc cinq mille francs en trop l


– Quelle chance, se dit-il, je vais pouvoir acheter une casquette ! Ce sont les copains qui vont être étonnés l et puis je ne vais pas acheter une casquette ordinaire, non, je trouverai bien, pour ce prix-là, une belle casquette de marque !

– Cet argent n’est pas à toi ! fit une voix intérieure. Le commerçant s’est trompé, il faut le lui rendre.

– Comment s’apercevra-t-il qu’il lui manque cinq mille francs ? souffla une autre voix à l’oreille de Paul. Tu as bien vu que son tiroir était plein de billets !

– Si on te demande d’où vient cette casquette, que répondras-tu ? Il faudra alors que tu mentes, reprit sa conscience.

– Je dirai que j’ai trouvé cinq mille francs, ce sera presque vrai, c’est presque comme si je les avais trouvés !

– Cet argent n’est pas à toi !

– Ce serait idiot de laisser échapper une si bonne occasion, pensa encore Paul. Djalo, le commerçant n’avait qu’à faire attention !

La conscience de Paul se tut, et il se dirigea vers le vendeur de casquettes.

– Où vas-tu Paul ? lui dirent quelques copains qui jouaient au foot sur la place.

– Je vais acheter une casquette, dit-il fièrement.

L’horloge sonna onze coups.

– Maman attend ces provisions pour le repas de midi, je n’ai plus de temps, s’écria le garçon, je reviendrai plus tard.

En repassant devant la boutique, il s’arrêta. Sa conscience protestait et le mettait mal à l’aise.

-Tu es un voleur si tu gardes ces cinq mille francs ! Entre vite et rends cet argent.

 

Paul ouvrit la porte de la boutique, se dirigea vers la caisse où Djalo faisait ses comptes.

– Monsieur, vous m’avez rendu ce billet en trop l

– En es-tu sûr ?

 – Oui, dit le garçon, maman m’avait donné dix mille francs, la note était de quatre mille, et voilà la monnaie que vous m’avez rendue.

Le commerçant compta. L’enfant avait raison.

– Mon pauvre garçon, je suis désolé, tu as dû revenir de chez toi pour me donner cet argent, tu aurais pu attendre demain pour me le rendre.

Paul hésita…

– Non, je m’en suis aperçu quand je suis sorti de votre boutique, mais d’abord… j’ai cru… qu’avec cet argent… je pourrais acheter une casquette… et puis, j’ai compris que ce serait voler…

Ah ! Que c’est dur d’avouer qu’on a presque été un voleur !

– Tu as bien fait, mon gars, c’est vrai que je ne me serais pas aperçu que c’était ton billet qui manquait à ma caisse, mais tu aurais perdu plus que moi, et tu en aurais été ennuyé… Et tu sais, quand on n’écoute pas sa conscience, elle finit par se taire, et c’est terrible. Mais tu es un brave garçon, et je vais te faire un cadeau. Tout en parlant, le commerçant avait pris sur un rayon un paquet enveloppé de papier.

– Je viens de recevoir une casquette, elle est très jolie. Je crois qu’elle te plaira.

– Je ne la mérite pas, dit Paul, gêné.

– Prends-la, ça me fait plaisir, insista Djalo, puis il regarda l’enfant s’en aller tout heureux.

Paul n’a jamais regretté d’avoir obéi à sa conscience.


Et toi, qu’aurais-tu fait à sa place ?